Raisonné, biologique, biodynamique, naturel…S’y retrouver dans le vocabulaire du vin :
Depuis quelques décennies, les standards de la conduite d’un vignoble et de l’élaboration des vins se sont énormément transformés. Jadis, avant l’arrivée des pesticides et des insecticides, on y allait à tâtons. Chacun avait sa recette, ses vérités et ça ne fonctionnait pas nécessairement aussi bien chez le voisin.
D’un pays à l’autre, même d’une région à l’autre, les façons de faire étaient très diversifiées et il en résultait énormément d’inégalités dans la qualité des vins. Ensuite vint l’ère des insecticides, des pesticides et des engrais de synthèse. Graduellement, les vignerons devinrent moins vulnérables aux caprices de mère Nature.
n y a même vu le triomphe extraordinaire du Progrès. La qualité des vins devint plus stable, la viticulture moins difficile, et, dans l’ensemble, on trouva que le nectar de Bacchus s’améliora. Ceux et celles qui se montrèrent réfractaires à étendre des produits étranges sur leurs terres et dans leurs moûts passèrent pour de vieux dinosaures incapables d’accepter le changement. Mais rapidement, on constata que cette magie scientifique avait ses limites… et ses dangers.
« Le vin est un carburant à conversation »
Frédéric Beigbeder
De nombreux vignerons ruinèrent ainsi l’équilibre naturel de leurs sols, détruisirent la biodiversité de leurs vignobles et parfois même, s’intoxiquèrent eux-mêmes ainsi que leurs communautés. Avec le temps, les vins devinrent de moins en moins bons, moins éclatants, moins « vivants ». L’industrialisation du vin battait son plein, avec ses montagnes de profits et… de produits biochimiques. Mais la parade tirait déjà à sa fin.
Plusieurs vignerons, souvent talentueux et passionnés, se mirent à sonner l’alarme. Est-ce que ces produits nouveaux étaient une bénédiction ou, au contraire, de puissants poisons ? Il y avait aussi le modèle économique enseigné dans les écoles d’agronomie, qui prônait l’optimisation excessive des ressources, qui ne convenait pas à la tâche d’élaboration de grands vins.
On prit alors un pas de recul et on reconsidéra la situation. Il fallait stopper cette catastrophe qui détruisait tout ce que leurs ancêtres avaient tellement choyé. De ces réflexions, de ces échanges et de ces expériences, naquirent plusieurs types de viticultures, lesquels nous survolerons aujourd’hui. Que le débat commence !
Viticulture raisonnée :
Premier pas vers une agriculture durable, cette démarche prône le minimum d’interventions possibles sur le vignoble et dans les chais. En quelques mots, l’on intervient que si on a vraiment besoin de le faire. Lors d’une invasion d’insectes ou d’une attaque de champignons, par exemple.
Certaines zones viticoles sont particulièrement difficiles à conduire en bio, souvent dû à une humidité plus élevée. La culture raisonnée devient alors un compromis intéressant pour le vigneron qui veut minimiser son impact sur l’environnement tout en s’assurant une viabilité financière.
Agrobiologie :
Cette démarche consiste à rejeter les engrais chimiques, les produits de synthèse, les pesticides et les insecticides. Tous les produits doivent être naturels, autant sur le vignoble que dans le chai. Le but est d’amener la vigne à répondre à ses agresseurs avec ses propres défenses naturelles et de n’être plus dépendante de l’intervention humaine.
Le terroir retrouve ainsi son équilibre naturel et la biodiversité peut s’y épanouir. Il faut cependant être vigilant, ce n’est pas parce que le vin a une certification agrobiologique (il en existe plusieurs) qu’il sera forcément réussi. Il y a du bon et du moins bon dans tous les types de culture !
Biodynamie :
Mouvement «naturel»:
«Dans la nature, le vin n’existe pas. Sans la main de l’Homme, la destination d’un mou de raisin est le vinaigre. Rien n’est plus culturel que le vin». -Pierre-François Terrat, Domaine Les Béates.
C’est en 1907 que l’on voit apparaitre pour la première fois la mention « vin naturel », lors de l’historique révolte des vignerons dans le Languedoc. Le terme a, à l’époque, une signification différente de son utilisation actuelle. Les vignerons s’indignent alors de la fabrication « artificielle » du vin, notamment de l’utilisation excessive du sucre dans les vinifications (dans le but de faire gonfler le pourcentage d’alcool).
Ce sera dans les années 50, sous l’influence du chimiste, vigneron et dégustateur de talent, Jules Chauvet, que le mouvement « naturel» prendra son sens moderne. Considéré comme le père fondateur de cette doctrine, Chauvet porte un regard philosophique sur l’art de l’élaboration des crus.
Acceptant comme base les principes de l’agrobiologie, il constate d’emblée que les « nouvelles » méthodes de fabrication du vin (correction artificielle des moûts, manipulations excessives) ne servent pas bien le produit et tendent à rendre les vignerons moins engagés et plus paresseux.
Il considère également que leurs ancêtres viticulteurs, qui n’avaient pas toutes ces technologies sous la main, faisaient néanmoins de très grands vins. Se met alors à s’articuler en lui une réflexion qui prône le minimum d’interventions et d’intrants lors de la fabrication d’un cru, de même que la valorisation d’un effort soutenu lors du travail à la vigne.
« En travaillant bien dans les champs, on a moins besoin d’intervenir dans les chais ». Une poignée de vignerons suivront sa pensée, surtout dans le Beaujolais et en Loire (Lapierre, Chanudet, Marionet). Ultimement, ces pionniers viticulteurs deviendront des icônes du mouvement, qui a maintenant de nombreux disciples.
Aujourd’hui, comme il n’existe pas de certification « vin nature ou naturel », le consommateur est vulnérable à toutes sortes de raccourcis intellectuels autour de cette mention. Le produit est commercial et il faut le vendre. On vous dira que le vin naturel est un vin sans soufre (ce qui est faux – le vin en contient toujours – c’est plutôt l’action d’en ajouter qui est une intervention).
On vous dira que les caractéristiques (historiquement considérées comme des défauts) d’un vin sont justifiables parce qu’il est « nature » (comme la refermentation spontanée en bouteille par exemple).
Bref, il y a énormément de confusion autour de ce courant viticole, et force est d’admettre que les vins qui en sont issus sont généralement plus instables. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’un vin nature (ou naturel) prend pour base l’agrobiologie et est fabriqué avec le moins d’intrants et de manipulations possibles.
Lorsqu’il est bien réussi, il propose une expression extraordinaire du terroir, tout en valorisant les caractéristiques génétiques des cépages et en honorant la tradition viticole de la zone de production. Malheureusement, pour arriver à une telle prouesse, il faut une attention de tous les instants, un savoir-faire basé sur l’expérience et surtout beaucoup, beaucoup de talent.
Je vous remercie pour votre attention lors de la lecture de cet article, je sais que je l’ai étiré légèrement (héhéhé)… J’espère que les nombreuses informations qu’il contient éclaireront vos choix et contribueront à rendre vos expériences de dégustation plus riches. Je crois sincèrement qu’il n’y a pas de vérité absolue dans ce domaine, qu’il y a des réussites et des échecs dans chaque type de viticulture.
Ce qui est essentiel, c’est de se reconnaître soi-même dans ses expériences liées aux vins, et de ne pas s’endoctriner avec ce que les modes commandent et ce que les autres souhaiteraient que l’on aime. « Est-ce que ça me plait ? Est-ce que ça me procure du plaisir, me fait voyager, m’émeut? »
Vous seul avez le droit de juger. Oui, le vin est complexe et nuancé, mais il ne le sera jamais autant que l’être humain. Je vous invite à poursuivre votre lecture sur mes quatre coups de cœur en vin raisonnés, biologiques, biodynamiques et naturels.
Maintenant vous voilà bien équiper pour partir direction la Rive Sud ou se trouve un des meilleurs restaurants le Tandem
L’équipe Tandem et votre humble sommelier,Samuel Dubois
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