C’est barricadé chez moi que je vous écris ces quelques lignes de vins de confinement.
Un moment d’espoir et de rêveries qui permettent à l’esprit de se dérober au moins quelques instants à la lourdeur quotidienne de cette crise extraordinaire que l’on traverse..
On a beau dire, chacun y va de sa méthode personnelle pour ne pas succomber à la peur, au stress, à la dépression, à l’anxiété que nous cause la pandémie. Plus que jamais, l’éventail des émotions négatives à expérimenter est vaste et diversifié.
Une offre absolument inédite! Mais plutôt que de s’enliser dans la morosité, je vous propose de prendre une saine distance avec ce hamster infernal qui ne cesse de tournoyer dans nos têtes, et de vous plonger à l’inverse dans une délicieuse coupe de vin en voyageant un peu avec moi.
Car en effet, le vin possède cette capacité incroyable de nous amener ailleurs, de nous faire explorer les paysages qui ont bercé sa jeunesse. Ainsi, le bon vin parle toujours la langue d’où il vient, avec ses patois, ses expressions particulières, ses tournures de phrases si authentiques et fascinantes.
Bien sûr, ce périple imaginaire n’est pas exactement comme partir à l’étranger pour vrai, mais je pense qu’une belle dégustation, c’est un plongeon dans la culture, un voyage gastronomique dans le monde du vin, dans le temps (grâce aux vieux millésimes notamment) et, quelques fois, un contact avec quelque chose qui nous dépasse complètement.
Or, dans le printemps interdit montréalais, je rêve aux ailleurs… Pour quelques vingtaines de dollars, je m’achète des tickets pour l’Europe. Ce sont des billets blancs, rosés, rouges, liquides et bien parfumés. Voici le voyage imaginé d’un pauvre confiné.
Nos vins de confinement
Varietales Garnacha Blanca 2017, Baron de Ley, Rioja, Espagne, 22,20$, +13844309 :
Je regarde mon premier billet. Quelques mots apparaissent dessus: Baron de Ley, Rioja, Garnacha Blanca 2017. À peine ai-je fini de les lire, je sens que mon corps est projeté dans les airs à une vitesse folle. J’ouvre lentement la bouteille, je tire le bouchon.
En dessous, il y a un hublot. Je jette un œil; c’est l’océan Atlantique dans toute sa splendeur! Chose étrange, l’eau semble d’un jaune doré très brillant, presque huileuse. Des vagues brillantes laissent de larges traces sur les rivages…
Ce vin blanc produit en petite quantité m’ouvre les yeux sur les flancs rocailleux de la Rioja. Un vent doux et sec me traverse sans résistance. Des parfums enivrants de miel, de poire, de citron confit et de gousse de vanille viennent à moi. Sur ma langue, une texture grasse et enivrante coule paresseusement.
Je visualise un plat riche et parfumé pour accompagner ce nectar. Un pétoncle poêlé au miel, à la crème et aux épices douces apparaît soudain devant moi. Et ce voyage ne fait pourtant que commencer…
Rosé du Domaine Ferrer-Ribière 2018, Roussillon, France, 18,50$, +12924711
Retour dans l’avion. Une hôtesse, jolie, me tend une coupe. Un liquide rose coule dedans. Je sens que l’avion décélère et se pose dans un soubresaut sur la piste d’atterrissage. Des arômes de groseille, de framboise, de rhubarbe et de cassonade inondent le cockpit. Enfin, je suis dans le Roussillon!
Ma bouche s’entre-ouvre, le vin et le pays y entrent. C’est bon! L’attaque est tout en fruit, avec une belle vivacité. J’ai l’impression de sentir la chaleur qui monte du sol vers les collines avoisinantes. Les arômes sont précis et délicats. Je vois presque les embruns méditerranéens du matin enlacer les vignes de grenache et de syrah. Ça goûte l’abondance. Ça goûte la poésie.
Je fais le vœux un peu fou de me faire servir une entrée délicate et gourmande. Sans qu’une seconde entière ne s’écoule, j’ai une salade niçoise de thon albacore grillé qui resplendit devant moi comme un miracle, comme un soir dans un des mes restaurants de fine cuisine française préférée : Le Tandem à Verchères
Hurluberlu 2019, Sébastien David, Val de Loire, France, 22,85$, +14172719
Quelques rêveries plus tard et je suis en Loire. Une humidité rafraîchissante émane du cours d’eau qui s’étire langoureusement pas très loin. Un jeune homme à la barbe bien taillée m’invite à sa table, aux milieu des vignes en fête. Dans ma coupe, il verse un liquide rouge et cristallin comme un rubis.
Des parfums purs de fruits des champs s’alignent avec une puissance impressionnante. Une bouche aérienne répond au nez, ajoutant un peu de poivre vert et de sauge fraîche. Sans que je n’aie à formuler quoique ce soit, il me tend un carpaccio de bœuf ou encore un tartare de cerf au câpres et fines herbes avec un sourire complice. J’ai envie de pleurer de joie.
Domaine Thymiopoulos 2016, Naoussa, Grèce, 23$, +13288218
Encore un tourbillon dans l’air chaud et je suis outre-mer. Cette fois, c’est la Grèce et l’appellation Naoussa qui m’ouvrent grand ses bras. L’atmosphère semble plus épaisse dans le jour qui commence déjà à basculer, et au loin j’entrevois la terrasse d’un restaurant où les gens rient et parlent fort. Je m’approche, curieux.
Sans davantage de cérémonie, comme si j’étais là depuis toujours, je reçois une coupe d’un vin rouge dense à la couleur légèrement tuilée. J’ose y plonger mon nez. Instantanément, je suis assailli par de délicieuses notes de fraises juteuses et de poivre noir fraîchement moulu!
Sur le palais, le liquide est puissant mais enveloppant. Comme l’étreinte d’un ami que l’on retrouve après une longue attente. Une pièce d‘agneau grillé aux herbes entretien une conversation soutenue avec le vin. En grec évidement. Au loin, le soleil poursuit sa chute inévitable dans la mer. Je respire profondément.
Je savoure encore un peu l’instant. Des milliers d’heures semblent défiler comme autant de visages.
Soudain, un frisson me parcourt; il fait un peu froid. J’ouvre les yeux. Je suis dans mon salon. Je suis seul. C’est le confinement. Les bouteilles sont vides. Il est temps de remplir mon cellier.
Je souris. Bons baisers les passionnés.
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Violette Sommellerie et l’équipe du Tandem
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Merci! Pour ce merveilleux voyage dans le monde intemporel du vin.
Je lève mon verre de Tandem à votre santé!
Louis V
Merci !
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